lundi 8 décembre 2008

Entre septembre 1999 et décembre 2008, j'aurais accumulé 20 mois de retard de salaires

Ce blog me donne enfin l'impression de ne pas témoigner dans le vide sidéral qui entoure les contractuels de l'Etat.

Et oui, je dis bien ETAT. Celui-ci même qui n'hésitera pas à vous mettre une pénalité de 10% si vous dépassez ne serait-ce que d'une heure la date limite de paiement de vos impôts (cachet de la poste faisant foi).

Je vais vous conter ma petite histoire :

Tout commence en 1999, major de ma promo de DEA, j'obtiens une allocation de recherche pour faire ma thèse et un poste à mi-temps comme monitrice à la Fac (un tout petit mot pour des profs qui font le même boulot qu'un enseignant-chercheur sauf qu'ils ont pas encore leur doctorat). CDD de 2 ans renouvelable 1 an. 3 ans maximum. Royal!

Je dois attendre mon salaire trois mois, qu'importe j'étais une misérable étudiante et je sais me serrer la ceinture.

Trois années passent, je décide de ne pas faire de demande de poste d'ATER (Attaché Temporaire d'Enseignement et de Recherche) pour finir ma thèse en 4ème année. ATER, c'est un statut bâtard, c'est comme les contractuels de l'enseignement agricole mais en pire : c'est un CDD d'un an renouvelable 1 an maximum. Je me réserve donc ces deux ans après le doctorat car je sais que les postes de titulaires se font rares, surtout dans ma matière.

Manque de bol, mes allocations chômage relèvent du rectorat et non des assedics et il faut savoir que pour l'ARE (Allocation de Retour à l'Emploi), c'est pareil que pour les salaires : « Veuillez attendre 3 mois avant premier paiement mademoiselle ! »

Là encore, j'avale la pilule, j'ai une thèse sur le feu ...


2004. Je soutiens ma thèse enceinte jusqu'aux yeux et obtiens un poste d'ATER dans ma ville. Nouveau contrat, nouveau trimestre de retard ... là encore je la boucle, de toute façon à qui le dire d'autre qu'à la pauvre secrétaire chargée d'enregistrer les dossiers.
Je fais mes 2 ans, je suis reçue sur la liste d'aptitude et ... ne trouve jamais de poste de maître de conférence. Ce bon vieux système de cooptation ne semble pas considérer l'intérêt de mon travail.
« Enchaînez trois ou quatre post-docs, et vous aurez un dossier digne d'un directeur de recherche, là vous trouverez certainement un poste » était le discours généralisé de mes paires titulaires.
NDLR : un post-doc c'est un CDD de recherche, de 6 à 24 mois maxi, payé entre 1100 € et 1500 € et pouvant se trouver n'importe où sur la planète.

Je décroche donc un post-doc à Paris dans un institut ultra renommé : gros points noirs 18 mois maxi et 1 500€ ......... pour une famille c'est bien trop précaire, de surcroit à Paris. Quelle idée aussi de faire des gosses à la fin de ses études, même à 30 ans !

C'en est trop, je jette l'éponge et pour « squizzer » la pénible phase des 3 mois sans ARE, je me jette dans le privé. Petit travail sympathique et intéressant, avec une paye acceptable, mais .... avec un patron tyrannique avec une nette tendance au harcèlement. En janvier 2008, je suis licenciée au bout de 20 mois pour m'être opposée aux pratiques de ce petit dictateur. Bon, rien de grave en somme, j'ai suffisamment cotisé au chômage pour que je puisse me retourner et peut-être revenir vers l'enseignement qui me manque.

Horreur ! Malheur ! Les assedics rejettent mon dossier : mes indemnisations chômages doivent être versée par le Rectorat car j'ai acquis plus de droits dans la fonction publique que dans le privé.

Et voici le déroulement de l'année 2008 :

janvier : dépôt de mon dossier aux assedic et rejet mi-février

mi-février : dépôt d'un dossier ARE au rectorat

mi-avril : premier versement de 50% des ARE dues. Nous n'avons pas payé le loyer et les factures de gaz et d'électricité durant ces trois mois, les frais de mise en demeure, les agios et les pénalités bancaires pleuvent.

Mai : nos cartes bancaires sont bloquées, nous n'arrivons pas à résorber le trou, mes allocations de retour à l'emploi arrivent sur mon compte sous forme d'avance de 85 % entre le 14 et le 26 de chaque mois, avec le complément le 29, lui aussi trois mois en décalé.

Enfin, nous réussissons à rétablir la situation en juillet grâce à l'aide de mes parents.

Août : nouveau coup de massue : le rectorat ferme, tout le monde part en vacances, alors vous comprenez bien qu'il n'y a personne pour faire les mises en paiement ! J'explose, pas de travail en perspective et le cauchemar financier qui recommence : rien de mi-juillet à fin septembre.

Septembre : enfin, une bouffée d'air : un poste d'ESC en lycée agricole, le travail rêvé pour moi ! Sauf que ... visiblement les contractuels sont aussi mal lotis qu'à l'Education Nationale.


Depuis septembre, je sombre à nouveau : toujours pas de contrat, un poste à mi-temps complété de 7 heures supplémentaires (passage à 90% refusé alors même que j'assure plus d'heures de cours qu'un titulaire à 100%).

Première avance de 1250 € le 31 octobre avec promesse que tout le complément serait versé avec mon salaire heures sup' comprises fin novembre.

26 novembre un virement intitulé « paye » de 840€ est versé. On est loin des 1755 € brut mensuel (heures sup' comprises).

Hier matin, message sur mon portable : la voix excédée de ma banquière m'annonce sur un ton humiliant que « ce n'est plus possible, cette fois je bloque vos cartes ». Demain, premier décembre, 16 jours avant l'anniversaire de mon fils et 23 jours avant Noël, nous démarrons le mois avec un débit de 1000€ sur nos comptes.

Pour l'année 2008, j'aurais totalisé 7 mois de retard de salaire ce qui représente environs 25% de revenu en moins envolés en frais d'intérêt, agios, pénalités de retard, commissions d'intervention, pénalités de rejet, frais d'huissiers et j'en passe. (exemple, mon prélèvement SFR de 34 € a été rejeté : 20 € de frais bancaires, ça fait cher l'abonnement)

Entre septembre 1999 et décembre 2008, j'aurais accumulé 20 mois de retard de salaires, non, vous ne rêvez pas, vous êtes en France au XXIème siècle.

Et si je faisais une grève de la faim ? À défaut d'être entendue j'économiserais les frais de nourriture !


Fanny

Précaires... sans salaire... sans contrat...

Bonsoir.

Je suis enseignant en physique chimie au lycée de wintzenheim depuis le premier septembre en tant qu' ACEN.
Mi octobre je pensais que le salaire ne tarderait pas (dans le privé il serait tombé au pire le 12) et lors de la réunion TUTAC organisée sur place, j'ai eu la stupéfaction de voir que je n'étais pas le seul.
Donc j'ai émis l'idée que nous étions bénévoles (hum !) et plusieurs collègues ont fait part de leur situation financière plus que "tendue" (pour rester correct)

Depuis cette réunion on nous promettait un paiement fin octobre puis au 10 puis au 20 novembre...
Ce n'est que le 25 que j'ai pu percevoir 75 % de la somme qui m'était due !

Se rendent-ils compte que derrière chaque prof se cache un être humain qui a besoin de manger et que se déplacer au lycée nécessite de remplir les réservoirs ?

Tant d'inhumanité parait irréel, là encore je resterai courtois mais il y aurait de quoi sortir quelques noms d'oiseaux!
Mais comment font -ils pour être si incompétents, si inhumains ...?
J'espère qu'ils auront au moins la délicatesse de s'excuser (mais ce n'est pas cela qui remboursera les agios payés par beaucoup d'entre nous)

Au lycée, nous avons prévu une journée d'action mardi 9 décembre pour exposer aux parents et aux médias notre situation humiliante, indigne et précaire.

Alexandre

vendredi 5 décembre 2008

De la précarité à …………la précarité.

Piquée par le virus de l’Education Socioculturelle en 1996, j’ai commencé en CFA par des vacations avec la certitude d’avoir trouvé ma voie.

Malgré cela, toute fraîche sortie d’une maîtrise et souhaitant avant tout me former, j’ai navigué vers d’autres horizons et d’autres missions jusqu’en 2003 où je suis revenue à l’ESC en tant qu’ACER à mi-temps.

J’ai fait deux ans dans le même établissement mais ayant besoin d’un plein temps, j’ai demandé et obtenu un poste à 100% à 250km de chez moi. En 2005, j’ai donc fait ce premier déménagement avec grand plaisir et j’ai passé une année formidable dans cet établissement avec en prime une inspection favorable et la reconnaissance de mes pairs.

Mais j’ai du quitter cet établissement puisqu’une titulaire est arrivée l’année suivante …. Pas de chance !!! Ce poste n’avait jamais été demandé par un titulaire depuis de nombreuses années et est actuellement de nouveau occupé par une contractuelle depuis deux ans.

Quoi qu’il en soit, me concernant, on m’a proposé fin août de cette même année un poste à 700 km de là….que j’ai accepté. J’ai donc remballé mes cartons avec un peu moins d’enthousiasme et surtout une facture plus substantielle.

Après une année dans cet établissement, j’ai eu une première proposition de poste à mi-temps à une centaine de km de mon lieu d’habitation et surtout une contractuelle déjà en poste peu désireuse de le « lâcher » ….je passerai les détails peu glorieux de cette période de harcèlement téléphonique pour m’inciter à trouver un poste ailleurs (comme si j’en avais le libre choix)…. et l’accueil « islandais » que m’ont réservé ses collègues lors de mon arrivée….

Suite à moult remous, j’ai au final « atterrie » dans un autre établissement à plein temps mais à 300km de chez moi….tout le monde était content !!!!

Cette fois, impossible d’envisager de nouveau un déménagement (mes finances criaient famine)…..j’ai donc opté pour une double résidence… et oui, quand on est contractuelle au MAP on ne se refuse rien…. Mais l’un dans l’autre, entre les deux loyers et les allers-retours….. j’ai craqué en janvier et démissionné….. suite à une proposition de CDD dans le secteur privé (ce qui relève d’un petit miracle quant on connaît la réticence des employeurs quand on annonce plusieurs années dans l’enseignement public….)

Février 2008, j’ai donc commencé une nouvelle vie avec le regret de quitter une profession que j’aimais….(Eh oui, ça arrive !) et pensant que mes tribulations de précaire au MAP étaient derrière moi.

Erreur, mon CDD n’ayant pu être renouvelé en juillet dernier faute de moyens, je me suis donc inscrite en tant que demandeur d’emploi et là……l’ASSEDIC m’a renvoyé vers le MAP responsable de ma prise en charge au titre de l’Allocation de Retour à l’Emploi.

Cette demande est en cours depuis le 8 août 2008….. nous sommes le 1er décembre….. je n’ai toujours aucune réponse effective du MAP quant à ma prise en charge éventuelle, et bien évidemment plus aucune rentrée d’argent depuis cette date. Pour le petit plus : mon dernier courrier recommandé du 20 novembre n’est toujours pas arrivé au MAP car il a croisé sur sa route la grève de la Poste….vraiment pas de chance qu’en on est dans l’urgence…. !!!!!!!!

Parallèlement, impossible de faire des demandes d’aides ou de minima sociaux….la réponse est toujours la même : je suis censée être prise en charge par le MAP…..

Au final : des dettes qui s’accumulent, un pied déjà bien engagé dans l’extrême précarité (je vais bientôt aller grossir les rangs du DAL (association du Droit Au Logement)), des portes qui se ferment un peu partout puisque officiellement je fais parti des demandeurs d’emploi bénéficiant d’une ARE et des journées qui alternent entre coups de téléphone, courriers pour tenter de débloquer ma situation et candidatures à tout va pour ne pas sombrer un peu plus….

Dommage, tout ce temps libre gâché !!!! ….j’aurai pu préparer le concours ESC ré-ouvert en 2009…Mais, là ma raison l’emporte : après un refus de l’administration pour que j’intègre le dispositif SAPIN et deux échecs à l’oral de ce même concours, il me semble évident que tout me dit que je n’ai pas la compétence pour ce métier… !!! Je l’avais juste assez pour boucher les trous en tant qu’ACE….

Hélène

Ex ESC Volante et même plus ... en colère.